sionomie et qui n’appartienne à aucun de ces genres distincts que nous tâcherons de définir.
Voulez-vous et pouvez-vous donner ce que nous appelons le bal grandiose ? Alors faites les choses grandement ; ayez, comme à l’ambassade d’Angleterre, des salons superbes, des galeries magnifiques, des corridors de fleurs, des laquais innombrables, un buffet perpétuel ; et puis invitez deux mille personnes, des Anglais, des Russes, des Français, des Espagnols, des Allemands, pour remplir, peupler, animer et consommer tout cela. Ce sera un splendide tableau féerique, tout rempli d’éblouissantes illusions, un panorama vivant où seront glorieusement représentées toutes les nations de l’Europe. On aura d’illustres personnages à regarder, d’intéressants souvenirs à rapporter ; on dansera, on causera, on se promènera, on s’amusera ; on se fatiguera bien un peu ; on souffrira du bruit de l’orchestre, du mouvement de la foule, de l’éclat des lumières ; on sera étourdi, mais on sera enchanté, et l’on s’écriera avec enthousiasme : C’est admirable ! jamais je n’ai vu une plus belle fête ! Le bal grandiose est en effet de tous les genres de réunions le plus estimé ; mais il n’est pas donné à tous d’y prétendre. Il exige des proportions gigantesques, il n’admet aucune arrière-pensée ; point de lésinerie, point de faux marché. Il faut lui consacrer toute votre demeure, lui sacrifier tous vos trésors, les fleurs de votre serre, les tableaux de votre salon intime ; il faut que cette foule brillante puisse circuler dans tous les sens ; il faut qu’on puisse la fuir elle-même, en se réfugiant dans votre élégante retraite. À l’heure du souper, il faut que ce peuple de convives soit d’un regard, sinon rassasié, du moins rassuré par le luxe du banquet et la facilité du service. On n’est affamé que parce qu’on craint de n’avoir rien à manger ; on ne s’aperçoit qu’il y a beaucoup de monde dans un bal que parce qu’on y manque de tout, d’air, de place, de sièges, de tables. Mais si au contraire on obtient aisément toutes ces choses, on ne se plaint pas d’être tant de gens à les chercher. Qu’importe la multitude là où se trouvent l’abondance et l’espace ! Aphorisme : Dans une fête, pour qu’il n’y ait point confusion, il faut qu’il y ait profusion.
Seconde espèce de bal, dit bal de vanité. Le bal de vanité