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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 5.djvu/149

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LETTRES PARISIENNES (1841).

sauver leur dot, le fruit de leur travail, le pain de leurs enfants, des mains d’un mari fripon, joueur ou frauduleusement infidèle, nous nous permettons de dire : Cela est une risible inconséquence. Et, certes, nous en avons bien le droit. Trait de mœurs.

Quand nous voyons des hommes d’esprit poursuivre d’une haine mesquine un grand talent et le combattre par des manœuvres indignes de gentilshommes de lettres, nous disons que cela est misérable, et nous en avons le droit. Trait de mœurs.

Quand nous voyons des anciens maîtres d’école, des épiciers retirés, s’arroger à eux seuls le droit de diriger les destinées du monde, nous trouvons cela fort plaisant, et nous le disons. Trait de mœurs.

Quand nous voyons des poëtes rêveurs comme l’auteur du Chemin de traverse, comme l’auteur de Sous les tilleuls, comme l’auteur de Fortunio, et même comme l’auteur de Madeleine, condamnés à se faire journalistes critiques par la bourgeoiseté des goûts et par l’impoésie des temps, et forcés de s’occuper toute la journée de choses et de gens qui leur sont si parfaitement indifférents, nous trouvons que cela est triste, et que c’est un bien affreux… trait de mœurs.

Quand nous voyons les femmes les plus collet monté de Paris, celles qui, par dévotion, ne vont jamais au spectacle, se réunir dans un petit salon pour voir cette bouffonne parade qui a pour titre : Passé minuit, — parade déjà fort risquée jouée à distance et par Arnal, sur un petit théâtre, mais qui doit sembler bien autrement intime représentée dans, une chambre, et jouée par un M. de B…, de C… ou de L…, qu’il faut complimenter après le spectacle, — nous trouvons cela fort étrange, et vous le trouvez aussi ; peut-être en doutez-vous ? Rien n’est plus vrai, pourtant. Passé minuit a été joué, l’autre soir, dans le petit salon de M. W…, devant le parterre le plus scrupuleux, qui s’en est beaucoup amusé. Demandez plutôt à M. de Castellane ; il sait bien cela, lui qui a eu le bon goût de refuser deux fois qu’on jouât cette pièce-là publiquement sur son théâtre. Trait de mœurs.

Quand nous voyons, dans nos fêtes les plus élégantes, cette