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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 5.djvu/318

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LE VICOMTE DE LAUNAY.

Que cette collection de géraniums est superbe ! Quelle variété dans ces couleurs ! quelle harmonie dans cette variété !

Que cette pyramide d’iris est élégante ! comme ces frais calices d’or et d’hyacinthe s’élèvent fièrement en laissant tomber autour d’eux, comme un large manteau de verdure, leur beau feuillage éploré !

Que ces montagnes de palmiers sont imposantes ! comme elles protègent avec orgueil ces bataillons d’ananas rangés à leurs pieds, semblables à des bataillons de grenadiers sous les armes !

— Regardez dans ces corbeilles ces grosses poires. — Des poires… encore ?

— Voyez ce superbe raisin ! — Du raisin… déjà ?

— Quelle est cette plante ? — Thé indigène. — Connaissez-vous ce thé-là ? — Il me semble en avoir déjà pris malgré moi. — Chez madame *** ? — Silence.

— Quel est ce pot de confitures verdâtres ? — Lisez : Confitures d’oseille ; c’est une nouvelle invention. — Oh ! que cela doit être mauvais, des confitures d’oseille ! je n’en goûterai jamais, j’en fais le serment solennel et l’on doit tenir de pareils serments.

— Ah ! ceci est une fougère ? — Oui, mais on l’appelle aujourd’hui adiantum tenerum. — Ce nom-là va déranger l’air célèbre ; comment pourra-t-on chanter maintenant : Que ne suis-je… ?

Mais j’aperçois un œillet de poëte : vous m’accorderez au moins que cette fleur est un œillet de poëte. — Il n’y a plus d’œillets de poëte ; on appelle ces fleurs-là maintenant deantus barbatus. Les poëtes n’ont plus de fleurs. — Tant mieux, ils en avaient choisi une fort laide, qui ne faisait guère honneur à leur goût ; peut-être seront-ils plus heureux dans leur choix nouveau.

— Les beaux papillons ! — Eh ! ce sont des pensées, les grandes pensées de Ragonnot.

— Oh ! le vilain animal ! — Où voyez-vous un animal ? — Là, un gros hérisson ! — C’est une plante grasse ; regardez, votre hérisson commence à fleurir. — Mais il est tard… nous sommes devant la porte, respirez encore cet air embaumé ;