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Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 5.djvu/478

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LE VICOMTE DE LAUNAY.

Mais qui donc a songé aux femmes ?… Personne, excepté cet ouvrier naïf qui, le jour de la grande revue pendant laquelle les troupes criaient si plaisamment : « Vive le gouvernement provisoire ! » criait à son tour, en voyant passer deux belles femmes : « Vivent les femmes provisoires ! » C’est le seul vœu qu’on ait émis sur le sort futur des femmes, et, vous le voyez, encore n’est-il pas flatteur.

Et cependant le beau pays de France a toujours été sauvé par les femmes ; et cependant, si la république peut être sauvée, elle le sera par les femmes. Vous riez… cela est pourtant bien facile à deviner : le seul danger qui menace la république, c’est la misère ; la seule querelle qui agite la France n’est plus, comme autrefois, la lutte des idées, c’est la bataille des intérêts ; il n’y a plus aujourd’hui en France que deux partis :

Le parti de ceux qui veulent tout garder.

Le parti de ceux qui veulent tout prendre.

Les seules questions pour lesquelles les hommes vont se battre, s’envoyer fraternellement des coups de fusil, sont des questions de cupidité et d’égoïsme… — Eh bien ? — Eh bien ! il n’y a que la charité qui puisse les résoudre.

Il n’y a que les femmes qui puissent prêcher contre ces hordes d’égoïstes sauvages une croisade de générosité ; il n’y a que les femmes des deux partis menaçants qui puissent sauver le pays par une magnanimité intelligente ; qui puissent, par leur éloquence avant le combat, forcer les hommes à être généreux, et, par leur amour après le sacrifice, les consoler de l’avoir été.

Enfin, la preuve que ces gens-là ne comprennent pas la république, c’est qu’ils flattent le peuple ; la république ne doit flatter personne ; la république, c’est la vérité couronnée. Ils le flattent et ils le ruinent, comme font tous les flatteurs de leurs dupes, de leurs victimes. Ils pouvaient le sauver, en soutenant les maisons de commerce qui le faisaient vivre, en secourant les manufactures qui le faisaient travailler ; ils ont laissé tomber ces comptoirs et ces manufactures ; ils ont préféré lui donner de l’argent de la main à la main eux-mêmes, pour le corrompre à leur profit, pour le dominer après l’avoir