Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 1.djvu/499

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l’antipathie naissent à son insu dans son âme pour ne plus s’y éteindre, et sans qu’il soit nécessaire de lui dire ce qu’il faut haïr, ce qu’il faut aimer.

Je n’examinerai pas si le Traité de législation n’eût pas pu être conçu sur un plan plus méthodique ; quand on l’a lu, on comprend qu’il n’est que le frontispice d’une œuvre immense, interrompue par la mort et à jamais soustraite aux ardents désirs des amis de l’humanité.

Ce que je puis dire, c’est ceci : Je ne connais aucun livre qui fasse plus penser, qui jette sur l’homme et la société des aperçus plus neufs et plus féconds, qui produise au même degré le sentiment de l’évidence. Dans l’injuste abandon où la jeunesse studieuse semble laisser ce magnifique monument du génie, je n’aurais peut-être pas le courage de me prononcer ainsi, sachant combien je dois me défier de moi-même, si je ne pouvais mettre mon opinion sous le patronage de deux autorités : l’une est celle de l’Académie, qui a couronné l’ouvrage de M. Comte ; l’autre est celle d’un homme du plus haut mérite, à qui je faisais cette question que les bibliophiles s’adressent souvent : Si vous étiez condamné à la solitude et qu’on ne vous y permît qu’un ouvrage moderne, lequel choisiriez-vous ? Le Traité de législation de M. Comte, me dit-il ; car si ce n’est pas le livre qui dit le plus de choses, c’est celui qui fait le plus penser[1].

  1. Il est peu de personnes, ayant eu des relations avec l’auteur, qui ne l’aient entendu désigner Ch. Comte comme celui de ses initiateurs, de ses maîtres auquel il devait le plus. Voir la correspondance et notamment les pages 60 et 62. (Note de l’éditeur.)