Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/195

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croissement indéfini des exportations, l’Angleterre comprend enfin que ce qui l’intéresse est de beaucoup importer, et que ce qu’elle donne de ses produits n’est et ne peut être que le payement de ce qu’elle reçoit et consomme de produits étrangers.

C’est là, quoi qu’on en dise, l’inauguration d’une politique toute nouvelle, car si recevoir est l’essentiel, il s’ensuit qu’elle doit ouvrir ses portes au lieu de les fermer ; il s’ensuit qu’elle doit désirer, dans son propre intérêt, le développement du travail et l’activité de la production chez tous les peuples ; il s’ensuit qu’elle doit successivement démolir tout cet échafaudage de monopoles, d’envahissements, d’empiétements et d’exclusion élevé sous l’influence du régime protecteur ; il s’ensuit, enfin, qu’elle doit renoncer à cette politique antisociale qui lui a servi à fonder un monstrueux édifice[1].

Sans doute nos adversaires ne peuvent comprendre ce changement. Attachés par conviction à la théorie mercantile, c’est-à-dire à un principe d’antagonisme international, ils ne peuvent pas se figurer qu’un autre peuple adopte le régime de la liberté, parce que, à leur point de vue, cela supposerait un acte de dévouement, d’abnégation et de pure philanthropie.

Mais ils devraient au moins reconnaître qu’à nos yeux il n’en est pas ainsi. Jamais nous n’avons dit que les réformes accomplies en Angleterre dans le sens libéral, et celles qui se préparent encore, soient dues à un accès de philanthropie qui aurait saisi tout à coup la classe laborieuse de l’autre côté du détroit.

Notre conviction est qu’un peuple qui adopte le régime restrictif se précipite dans une politique antisociale et en même temps fait pour lui-même un mauvais calcul ; qu’au

  1. V. au tome III, Deux Angleterres, pages 459 et suiv. (Note de l’éditeur.)