Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/197

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Nous examinerons dans un prochain article[1] l’objection que nous venons de reproduire. Ici nous avons voulu expliquer le sentiment de défiance qui existe dans notre pays à l’égard de l’Angleterre. Nous avons voulu dire ce qui le justifie et dans quelle mesure nous le partageons. En Angleterre, deux partis, deux doctrines, deux principes sont en présence et se livrent en ce moment une lutte acharnée. L’un de ces principes s’appelle privilége ; l’autre se nomme droit commun. Le premier a constamment prévalu jusqu’à nos jours, et c’est à lui que se rattache toute cette politique jalouse, astucieuse et antisociale qui a excité en France, en Europe, et en Angleterre même, parmi les classes laborieuses, un sentiment de répugnance et de résistance que nous comprenons et que nous éprouvons plus que personne. Par un juste retour des choses d’ici-bas, nous pensons que ce sentiment pèsera sur l’Angleterre et lui fera obstacle, même longtemps après qu’elle aura officiellement renoncé à la politique qui l’a fait naître.

Mais nous ne nous croyons pas tenus de partager à cet égard le préjugé vulgaire ; et si nous voyons surgir de l’autre côté du détroit le principe du droit commun, si nous le voyons soutenu par des hommes éclairés et sincères, si c’est notre conviction que ce principe mine en dessous et fera bientôt crouler l’édifice élevé par le principe opposé, nous ne voyons pas pourquoi, tout en attachant sur les manœuvres oligarchiques un regard vigilant, nous n’accompagnerions pas de nos vœux et de nos sympathies un mouvement libéral dans lequel nous voyons le signal de l’affranchissement du monde, le gage de la paix et le triomphe de la justice.

  1. V. au tome IV, le chap. Domination par le travail, page 265. (Note de l’éditeur.)