Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/185

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que les étrangers qui nous porteront du blé ou du sucre rapporteront de nos marchandises en ballots de 6 livres, pour éviter la surveillance de leur douane. Mais, après tout, ce ne sont là que des excuses et de vains prétextes ; nous y sommes accoutumes, nous y sommes préparés, on ne peut plus nous y prendre ; et le mieux est de ne pas les écouter. Sommes-nous d’accord sur ce point, qu’il est juste de renverser le monopole ? Qu’on ne nous parle pas de la Russie, du Portugal ou de l’Espagne ; nous nous en occuperons plus tard (bien, bien) ; nous ne manquons pas chez nous d’ennemis d’une pire espèce (bravos) ; ne perdons pas de vue l’objet de notre association, qui est d’emporter le retrait des lois-céréales, absolument, immédiatement et sans condition[1]. Si nous renoncions au mot sans condition, nous aurions un nouveau débordement de prétextes à chaque semaine.


Ici l’orateur rend compte de la tournée qu’il a faite dans les districts agricoles et de l’état de l’opinion parmi les fermiers.


J’ai assisté dans le comté de Hartford, à un meeting où étaient réunis plus de deux mille fermiers ; il avait été annoncé longtemps à l’avance. Je m’y suis présenté seul (applaudissements) sans être accompagné d’un ami, sans avoir une seule connaissance dans tout le comté. (Bravos.) Nous nous réunîmes d’abord dans le Shire Hall (salle du comté) ; mais n’étant pas assez spacieuse, nous tînmes le meeting à ciel ouvert, à Plough-Meal où se font ordinairement les élections. Je pris ma place sur un wagon ; je débitai mon thème pendant près de deux heures (rires et applaudissements) ; et sur le champ même où, il y a près de deux ans, la fine fleur de la chevalerie du comté, sous la bannière du conservatisme, fit élire par les fermiers trois partisans du monopole et de la protection, sur ce même champ, je

  1. Le mot : unconditional (sans condition), adopté par la Ligue, se rapporte à l’étranger et signifie : sans demander des concessions réciproques.