Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/196

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les étourdis qui se laissent prendre à de pareilles jongleries, ne sont que des enfants, quel que soit leur âge, et en effet, ne faut-il pas être bien novice, que ce soit faute d’années ou faute d’intelligence, pour tomber dans des pièges aussi grossiers ? Les lois-céréales affectent également toute la communauté, et la taxe du pain coûte plus aux habitants de Londres qu’à tous ceux du Lancastre ; et n’est-ce point une véritable puérilité que de se laisser mettre sur une fausse quête, et d’aller chercher la cause du mal dans le Lancastre, sans regarder autour de nous et chez nous ? Mais enfin, admettons que les machines aient l’effet qu’on leur attribue ; — condamnons ces puissantes inventions, ces merveilleuses applications de la science, qui ont arraché l’espèce humaine à l’état sauvage, et qui ont fait, pour ainsi dire, le fer lui-même participant de la vie ; ne voyons dans ces merveilles que malédictions pour le pays ; élevons-nous contre la Divinité elle-même : reprochons-lui d’avoir soufflé dans l’esprit humain le désir et la faculté de s’élever dans le champ indéfini des découvertes ; accordons tout cela. Qu’en résultera-t-il ? Est-ce que les choses en iront mieux, parce qu’une taxe sur le pain viendra ajouter ses nuisibles effets aux nuisibles effets de ces machines maudites ? (Véhémentes acclamations.) Je le répète, il n’y a que l’enfance, l’enfance morale, qui puisse être dupe de ces clameurs contre les machines, puisque nos maux sont les mêmes, que les machines soient une malédiction, ou qu’elles soient un bienfait ; puisqu’ils pèsent également sur nous tous, soit que nous travaillions avec nos dents et nos ongles, soit que nous appelions à notre aide les forces des vents et de la vapeur, — et ce que je dis des machines, je le dis aussi de toutes autres clameurs élevées pour faire perdre de vue le grand fléau, la grande iniquité : — la rareté des aliments.

Quelques personnes parlent d’un changement dans la valeur des espèces métalliques. Nous ne nous y opposons pas ; mais ce dont souffre le pays, ce n’est pas la rareté du numéraire, c’est la rareté des aliments, et jamais nos efforts ne se ralentiront, jusqu’à ce que nous ayons renversé toutes les barrières qui nous en séparent. (Bruyantes acclamations.) J’appelle une