Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/23

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même les noms de ces hommes dignes de toutes les bénédictions de l’humanité, les Cobden, les Bright, les Moore, les Villiers, les Thompson, les Fox, les Wilson et mille autres qui ont osé engager le combat, qui le soutiennent avec un talent, un courage, un dévouement, une énergie admirables ? C’est une pure question de liberté commerciale, dit-on. Et ne voit-on pas que la liberté du commerce doit ravir à l’oligarchie et les ressources de la spoliation intérieure, — les monopoles, — et les ressources de la spoliation extérieure, — les colonies, — puisque monopoles et colonies sont tellement incompatibles avec la liberté des échanges, qu’ils ne sont autre chose que la limite arbitraire de cette liberté !

Mais que dis-je ? Si la France a quelque vague connaissance de ce combat à mort qui va décider pour longtemps du sort de la liberté humaine, ce n’est pas à son triomphe qu’elle semble accorder sa sympathie. Depuis quelques années, on lui a fait tant de peur des mots liberté, concurrence, sur-production ; on lui a tant dit que ces mots impliquent misère, paupérisme, dégradation des classes ouvrières ; on lui a tant répété qu’il y avait une économie politique anglaise, qui se faisait de la liberté un instrument de machiavélisme et d’oppression, et une économie politique française qui, sous les noms de philanthropie, socialisme, organisation du travail, allait ramener l’égalité des conditions sur la terre, — qu’elle a pris en horreur la doctrine qui ne se fonde après tout que sur la justice et le sens commun, et qui se résume dans cet axiome : « Que les hommes soient libres d’échanger entre eux, quand cela leur convient, les fruits de leurs travaux. — » Si cette croisade contre la liberté n’était soutenue que par les hommes d’imagination, qui veulent formuler la science sans s’être préparés par l’étude, le mal ne serait pas grand. Mais n’est-il pas douloureux de voir de vrais économistes, poussés sans