Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/294

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au bonheur de la race humaine, à la stabilité et à l’honneur de l’empire britannique, ne le cède point en grandeur et en solennité à cette autre question à laquelle, dans d’autres temps, je consacrai mes efforts. Si je réclamais alors la liberté de l’homme, je réclame aujourd’hui la franchise de ses aliments. (Acclamations.) Dieu a voulu que l’homme fût libre ; et je crois qu’il a voulu aussi que l’homme vécût. C’est un crime de lui ravir la liberté, mais c’est aussi un crime d’élever le prix, d’altérer la qualité ou de diminuer la quantité de ses aliments ; et quand je viens à considérer que la loi-céréale affecte les salaires, rompt l’équilibre entre l’offre et la demande des bras, jette hors d’emploi des millions d’ouvriers, ne laisse à ceux qui sont assez heureux pour s’en procurer que la moitié d’une juste rémunération, et les force en outre de payer le pain à un prix double de celui qu’il aurait sans son intervention, alors je dis qu’une telle loi m’ apparaît comme une monstrueuse spoliation (applaudissements), et comme la violation de cette charte descendue du ciel sur la terre : « Homme, tu mangeras les fruits de la terre ; la saison de semer et la saison de moissonner, l’hiver et l’été se succéderont à perpétuité, afin que les créatures de Dieu ne soient pas privées de nourriture. » Quel est le grand principe d’économie sociale dont nous confions la propagation à nos concitoyens, pour leur bonheur, celui de la patrie et du monde ? Quelle est cette doctrine que la Ligue, comme une mouvante université, prêche et enseigne en tous lieux ? C’est que toutes les classes de la communauté doivent être abandonnées à leur libre action, dans la conduite de leurs transactions commerciales, tout autant que ces transactions soient en elles-mêmes honnêtes et honorables ; — c’est qu’on ne doit souffrir aucune intervention, aucun contrôle, et moins encore aucune contrainte législative en matière de travail, d’industrie et d’échanges. (Écoutez ! écoutez !) Nous avons foi dans la vérité de cette doctrine ; mais nous ne nous bornons pas à l’ériger en un système abstrait, qu’on prend et qu’on laisse à volonté. Nous la regardons comme d’une importance pratique et capitale pour ce pays et pour tous les pays, pour ce temps et pour tous les temps. Dans son application honnête et impartiale, elle im-