Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/323

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par d’autres classes ; machines qui sont comme les bras de l’Angleterre, dont elle se sert pour disséminer dans le monde les richesses de son industrie, rapporter et répandre avec profusion, au sein de l’empire, les trésors accumulés dans tout l’univers. (Tonnerre d’applaudissements.) Ce souple et léger duvet arraché à la fleur du cotonnier, telle est la substance à laquelle cette grande nation doit sa puissance et sa splendeur. (Applaudissements.) Ainsi, le Lancastre est l’enfant du travail et de l’industrie sous leurs formes les plus magnifiques. Naguère il essayait encore ses premiers pas dans la vie ; il est maintenant plein de force et de puissance, et dans le court espace de temps qui suffit à l’enfant pour devenir homme, il est devenu un géant aux proportions colossales. Et pourtant, malgré sa vigueur, ce géant languit comme abattu sous les liens et les chaînes qu’une politique imprévoyante, ignorante et arriérée a imposés à ses membres musculeux. (Applaudissements prolongés. ) La question, pour les électeurs du Lancastre, est donc de savoir si ces entraves doivent durera toujours. (Écoutez ! écoutez !) Riveront-ils eux-mêmes ces fers par leurs suffrages, ou sauront-ils s’en dégager comme des hommes ? Si les électeurs savaient tout ce qui dépend de leurs votes, quel est l’homme, dans ce comté, ou ailleurs, qui oserait aller leur demander leurs voix en faveur de ce fléau pestilentiel — la loi-céréale, et tous les monopoles qui l’accompagnent ? (Bruyantes acclamations.) S’ils étaient pénétrés de cette conviction (et je crois qu’elle a gagné beaucoup d’entre eux) que la détresse des cinq dernières années doit son origine à cette loi ; s’ils savaient qu’elle a précipité bien des négociants de la prospérité à la ruine, et bien des artisans de l’aisance à la misère ; qu’elle a poussé le peuple à l’expatriation, porté la désolation dans des milliers de chaumières, la douleur et le découragement dans le cœur de millions de nos frères ; s’ils savaient cela, croyez-vous qu’ils iraient appuyer de leurs suffrages la plus aveugle, la plus hypocrite folie qui soit jamais entrée dans l’esprit de la législation d’aucun peuple de la terre ? (Acclamations prolongées.) Oh ! si les électeurs pouvaient voir ce meeting ; si chacun d’eux, debout sur cette estrade, pouvait sentir les regards de six mille de ses