Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/338

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j’espérais vous voir vous acquitter aujourd’hui, et que vous vous empresserez de remplir, j’en ai la certitude, dans une prochaine occasion. Je pensais ce soir combien c’est un glorieux : spectacle que de voir une grande nation presque unanime, poursuivant un but tel que celui que nous avons en vue, par des moyens aussi conformes à la justice universelle que ceux qu’emploie l’Association. En 1826, le secrétaire d’État, qui occupe aujourd’hui le ministère de l’intérieur, fit un livre pour persuader aux monopoleurs de renoncer à leurs priviléges, et il les avertissait que, s’ils ne s’empressaient pas de céder et de subordonner les intérêts privés aux grands et légitimes intérêts des masses, le temps viendrait où, dans ce pays, comme dans un pays voisin, le peuple se lèverait dans sa force et dans sa majesté, et balaierait de dessus le sol de la patrie et leurs honneurs, et leurs titres, et leurs distinctions, et leurs richesses mal acquises. Qu’est-ce qui a détourné, qu’est-ce qui détourne encore cette catastrophe dont l’idée seule fait reculer d’horreur ? C’est l’intervention de la Ligue avec son action purement morale, intellectuelle et pacifique, rassemblant autour d’elle et accueillant dans son sein les hommes de la moralité la plus pure, non moins attachés aux principes du christianisme qu’à ceux de la liberté, et décidés à ne poursuivre leur but, quelque glorieux qu’il soit, que par des moyens dont la droiture soit en harmonie avec la légitimité de la cause qu’ils ont embrassée. Si l’ignorance, l’avarice et l’orgueil se sont unis pour retarder le triomphe de cette cause sacrée, une chose du moins est propre à nous consoler et à soutenir notre courage, c’est que chaque heure de retard est employée par dix mille de nos associés à propager les connaissances les plus utiles parmi toutes les classes de la communauté. Je ne sais vraiment pas, s’il était possible de supputer le bien qui résulte de l’agitation actuelle, je ne sais pas^ dis-je, s’il ne présenterait pas une ample compensation au mal que peuvent produire, dans le même espace de temps, les lois qu’elle a pour objet de combattre. Le peuple a été éclairé, la science et la moralité ont pénétré dans la multitude, et si le monopole a empiré la condition physique des hommes, l’association a élevé leur esprit et donné de la vi-