Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/170

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IV. — CONSEIL INFÉRIEUR DU TRAVAIL.


« Quoi ! vous avez le front de demander pour tout citoyen le droit de vendre, acheter, troquer, échanger, rendre et recevoir service pour service et juger pour lui-même à la seule condition de ne pas blesser l’honnêteté et de satisfaire le trésor public ? Vous voulez donc ravir aux ouvriers le travail, le salaire et le pain ? »

Voilà ce qu’on nous dit. Je sais qu’en penser ; mais j’ai voulu savoir ce qu’en pensent les ouvriers eux-mêmes.

J’avais sous la main un excellent instrument d’enquête.

Ce n’étaient point ces conseils supérieurs de l’industrie, où de gros propriétaires qui se disent laboureurs, de puissants armateurs qui se croient marins, et de riches actionnaires qui se prétendent travailleurs, font de cette philanthropie que l’on sait.

Non ; c’étaient des ouvriers pour tout de bon, des ouvriers sérieux, comme on dit aujourd’hui, menuisiers, charpentiers, maçons, tailleurs, cordonniers, teinturiers, forgerons, aubergistes, épiciers, etc., etc., qui, dans mon village, ont fondé une société de secours mutuels.

Je la transformai, de mon autorité privée, en conseil inférieur du travail, et j’en obtins une enquête qui en vaut bien une autre, quoiqu’elle ne soit pas bourrée de chiffres et enflée aux proportions d’un in-quarto imprimé aux frais de l’État.

Il s’agissait d’interroger ces braves gens sur la manière dont ils sont, ou se croient affectés par le régime protecteur. Le président me fit bien observer que c’était enfreindre quelque peu les conditions d’existence de l’association. Car, en France, sur cette terre de liberté, les gens qui s’associent renoncent à s’entretenir de politique, c’est-à-dire de leurs