Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/270

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bienfaits de l’ordonnance s’étendront aussi sur cette intéressante portion de la grande famille dont le sort excite toute votre sollicitude. Quelle est la destinée des femmes en France ? Le sexe le plus audacieux et le plus endurci aux fatigues les chasse insensiblement de toutes les carrières.

Autrefois elles avaient la ressource des bureaux de loterie. Ils ont été fermés par une philanthropie impitoyable ; et sous quel prétexte ? « Pour épargner, disait-elle, le denier du pauvre. » Hélas ! Le pauvre a-t-il jamais obtenu, d’une pièce de monnaie, des jouissances aussi douces et aussi innocentes que celle que renfermait pour lui l’urne mystérieuse de la fortune ? Sevré de toutes les douceurs de la vie, quand il mettait, de quinzaine en quinzaine, le prix d’une journée de travail sur un quaterne sec, combien d’heures délicieuses n’introduisait-il pas au sein de sa famille ? L’espérance avait toujours sa place au foyer domestique. La mansarde se peuplait d’illusions : la femme se promettait d’éclipser ses voisines par l’éclat de sa mise, le fils se voyait tambour-major, la fille se sentait entraînée vers l’autel au bras de son fiancé.

C’est quelque chose encore que de faire un beau rêve !

Oh ! La loterie, c’était la poésie du pauvre, et nous l’avons laissée échapper !

La loterie défunte, quels moyens avons-nous de pourvoir nos protégées ? Le tabac et la poste.

Le tabac, à la bonne heure ; il progresse, grâce au ciel et aux habitudes distinguées que d’augustes exemples ont su, fort habilement, faire prévaloir parmi notre élégante jeunesse.

Mais la poste !… Nous n’en dirons rien, elle fera l’objet d’un rapport spécial.

Sauf donc le tabac, que reste-t-il à vos sujettes ? Rien que la broderie, le tricot et la couture, tristes ressources qu’une