Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/29

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III. — EFFORT, RÉSULTAT.


Nous venons de voir qu’entre nos besoins et leur satisfaction s’interposent des obstacles. Nous parvenons à les vaincre ou à les affaiblir par l’emploi de nos facultés. On peut dire d’une manière très-générale que l’industrie est un effort suivi d’un résultat.

Mais sur quoi se mesure notre bien-être, notre richesse  ? Est-ce sur le résultat de l’effort  ? est-ce sur l’effort lui-même ? — Il existe toujours un rapport entre l’effort employé et le résultat obtenu. — Le progrès consiste-t-il dans l’accroissement relatif du second ou du premier terme de ce rapport ?

Les deux thèses ont été soutenues ; elles se partagent, en économie politique, le domaine de l’opinion.

Selon le premier système, la richesse est le résultat du travail. Elle s’accroît à mesure que s’accroît le rapport du résultat à l’effort. La perfection absolue, dont le type est en Dieu, consiste dans l’éloignement infini des deux termes, en ce sens : effort nul, résultat infini.

Le second professe que c’est l’effort lui-même qui constitue et mesure la richesse. Progresser, c’est accroître le rapport de l’effort au résultat. Son idéal peut être représenté par l’effort à la fois éternel et stérile de Sisyphe[1].

Naturellement, le premier accueille tout ce qui tend à diminuer la peine et à augmenter le produit : les puissantes machines qui ajoutent aux forces de l’homme, l’échange qui permet de tirer un meilleur parti des agents naturels distribués à diverses mesures sur la surface du globe, l’intelli-

  1. Par ce motif, nous prions le lecteur de nous excuser si, pour abréger, nous désignons dans la suite ce système sous le nom de Sisyphisme.