Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/395

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frais et risques ; mais bien le droit de nous les imposer par l’intermédiaire de la Loi, c’est-à-dire des forces et des contributions publiques.

Je demande que les Cabétistes, les Fouriéristes, les Proudhoniens, les Universitaires, les Protectionistes renoncent non à leurs idées spéciales, mais à cette idée qui leur est commune, de nous assujettir de force à leurs groupes et séries, à leurs ateliers sociaux, à leur banque gratuite, à leur moralité gréco-romaine, à leurs entraves commerciales. Ce que je leur demande, c’est de nous laisser la faculté de juger leurs plans et de ne pas nous y associer, directement ou indirectement, si nous trouvons qu’ils froissent nos intérêts, ou s’ils répugnent à notre conscience.

Car la prétention de faire intervenir le pouvoir et l’impôt, outre qu’elle est oppressive et spoliatrice, implique encore cette hypothèse préjudicielle : l’infaillibilité de l’organisateur et l’incompétence de l’humanité.

Et si l’humanité est incompétente à juger pour elle-même, que vient-on nous parler de suffrage universel ?

Cette contradiction dans les idées s’est malheureusement reproduite dans les faits, et pendant que le peuple français a devancé tous les autres dans la conquête de ses droits, ou plutôt de ses garanties politiques, il n’en est pas moins resté le plus gouverné, dirigé, administré, imposé, entravé et exploité de tous les peuples.

Il est aussi celui de tous où les révolutions sont le plus imminentes, et cela doit être.

Dès qu’on part de cette idée, admise par tous nos publicistes et si énergiquement exprimée par M. L. Blanc en ces mots : « La société reçoit l’impulsion du pouvoir » ; dès que les hommes se considèrent eux-mêmes comme sensibles mais passifs, incapables de s’élever par leur propre discernement et par leur propre énergie à aucune moralité, à aucun bien-être, et réduits à tout attendre de la Loi ; en un