Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/538

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statée à propos de l’impôt : le consommateur, en définitive, supporte toutes les charges, comme il recueille tous les avantages de la production. Aussi, il nous est arrivé au sujet de ces primes la chose la plus mortifiante et la plus mystifiante possible. Quelques gouvernements étrangers ont fait ce raisonnement : « Si nous élevons nos droits d’entrée d’un chiffre égal à la prime payée par les contribuables français, il est clair que rien ne sera changé pour nos consommateurs, car le prix de revient sera pour eux le même. La marchandise dégrévée de 5 fr. à la frontière française paiera 5 fr. de plus à la frontière allemande ; c’est un moyen infaillible de mettre nos dépenses publiques à la charge du Trésor français. » Mais d’autres gouvernements, m’assure-t-on, ont été plus ingénieux encore. Ils se sont dit : « La prime donnée par la France est bien un cadeau qu’elle nous fait ; mais si nous élevons le droit, il n’y a pas de raison pour qu’il entre chez nous plus de cette marchandise que par le passé ; nous mettons nous-mêmes une borne à la générosité de ces excellents Français. Abolissons, au contraire, provisoirement ces droits ; provoquons ainsi une introduction inusitée de leurs draps, puisque chaque mètre porte avec lui un pur don gratuit. » Dans le premier cas, nos primes ont été au fisc étranger ; dans le second, elles ont profité, mais sur une plus large échelle, aux simples citoyens.

Passons à la restriction.

Je suis artisan, menuisier, par exemple. J’ai un petit atelier, des outils, quelques matériaux. Tout cela est incontestablement à moi, car j’ai fait ces choses, ou, ce qui revient au même, je les ai achetées et payées. De plus, j’ai des bras vigoureux, un peu d’intelligence et beaucoup de bonne volonté. C’est avec ce fonds que je dois pourvoir à mes besoins et à ceux de ma famille. Remarquez que je ne puis produire directement rien de ce qui m’est nécessaire,