Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/551

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condaire ; jusque-là que, parce que nous en tenons grand compte, on nous y traite, nous, de froids économistes, d’égoïstes, d’individualistes, de bourgeois, d’hommes sans entrailles, ne reconnaissant pour Dieu que le vil intérêt[1]. Bon, me dis-je, voilà de nobles cœurs avec lesquels je n’ai pas besoin de discuter le point de vue économique, qui est fort subtil et exige plus d’application que les publicistes parisiens n’en peuvent, en général, accorder à une étude de ce genre. Mais, avec ceux-ci, la question d’Intérêt ne saurait être un obstacle ; ou ils le croiront, sur la foi de la Sagesse Divine, en harmonie avec la justice, ou ils le sacrifieront de grand cœur, car ils ont soif de Dévouement. Si donc ils m’accordent une fois que le Libre-Échange, c’est le droit abstrait, ils s’enrôleront résolûment sous sa bannière. En conséquence, je leur adressai mon appel. Savez-vous ce qu’ils me répondirent ? Le voici :

Votre Libre-Échange est une belle utopie. Il est fondé en droit et en justice ; il réalise la liberté ; il consacre la propriété ; il aurait pour conséquence l’union des peuples, le règne de la fraternité parmi les hommes. Vous avez mille fois raison en principe, mais nous vous combattrons à outrance et par tous les moyens, parce que la concurrence étrangère serait fatale au travail national.

Je pris la liberté de leur adresser cette réponse :

Je nie que la concurrence étrangère fût fatale au travail national. En tout cas, s’il en était ainsi, vous seriez placés entre l’Intérêt qui, selon vous, est du côté de la restriction, et la Justice qui, de votre aveu, est du côté de la liberté ! Or, quand moi, l’adorateur du veau d’or, je vous mets en de-

  1. Voy. au tome II, la plupart des articles compris sous cette rubrique : Polémique contre les journaux, et notamment l’article intitulé : Le Parti démocratique et le Libre-Échange. (Note de l’éditeur.)