Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/56

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.


V. — NOS PRODUITS SONT GREVÉS DE TAXES.


C’est le même sophisme. On demande que le produit étranger soit taxé, afin de neutraliser les effets de la taxe qui pèse sur le produit national. Il s’agit donc encore d’égaliser les conditions de la production. Nous n’aurions qu’un mot à dire : c’est que la taxe est un obstacle artificiel qui a exactement le même résultat qu’un obstacle naturel, celui de forcer la hausse du prix. Si cette hausse arrive au point qu’il y ait plus de perte à créer le produit lui-même qu’à le tirer du dehors en en créant la contre-valeur, laissez faire. L’intérêt privé saura bien de deux maux choisir le moindre. Je pourrais donc renvoyer le lecteur à la démonstration précédente ; mais le sophisme que j’ai ici à combattre revient si souvent dans les doléances et les requêtes, j’allais dire les sommations de l’école protectioniste, qu’il mérite bien une discussion spéciale.

Si l’on veut parler d’une de ces taxes exceptionnelles qui frappent certains produits, je conviendrai volontiers qu’il est raisonnable d’y soumettre le produit étranger. Par exemple, il serait absurde d’affranchir de l’impôt le sel exotique ; non qu’au point de vue économique la France y perdît rien, au contraire. Quoi qu’on en dise, les principes sont invariables ; et la France y gagnerait, comme elle gagnera toujours à éviter un obstacle naturel ou artificiel. Mais ici l’obstacle a été mis dans un but fiscal. Il faut bien que ce but soit atteint ; et si le sel étranger se vendait sur notre marché, franc de droit, le Trésor ne recouvrerait pas ses cent millions, et il devrait les demander à quelque autre branche de l’impôt. Il y aurait inconséquence évidente à