Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 4.djvu/58

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rables que celui qui en est affranchi, c’est un sophisme. — Nous payons vingt millions pour la justice et la police, c’est vrai ; mais nous avons la justice et la police, la sécurité qu’elles nous procurent, le temps qu’elles nous épargnent ; et il est très-probable que la production n’est ni plus facile ni plus active parmi les peuples, s’il en est, où chacun se fait justice soi-même. — Nous payons plusieurs centaines de millions pour des routes, des ponts, des ports, des chemins de fer : j’en conviens. Mais nous avons ces chemins, ces ports, ces routes ; et à moins de prétendre que nous faisons une mauvaise affaire en les établissant, on ne peut pas dire qu’ils nous rendent inférieurs aux peuples qui ne supportent pas, il est vrai, de budget de travaux publics, mais qui n’ont pas non plus de travaux publics. — Et ceci explique pourquoi, tout en accusant l’impôt d’être une cause d’infériorité industrielle, nous dirigeons nos tarifs précisément contre les nations qui sont les plus imposées. C’est que les taxes, bien employées, loin de les détériorer, ont amélioré les conditions de production de ces peuples. Ainsi, nous arrivons toujours à cette conclusion, que les sophismes protectionistes ne s’écartent pas seulement du vrai, mais sont le contraire, l’antipode de la vérité[1].

Quant aux impôts qui sont improductifs, supprimez-les, si vous pouvez ; mais la plus étrange manière qu’on puisse imaginer d’en neutraliser les effets, c’est assurément d’ajouter aux taxes publiques des taxes individuelles. Grand merci de la compensation ! L’État nous a trop taxés, dites-vous. Eh ! raison de plus pour ne pas nous taxer encore les uns les autres !

Un droit protecteur est une taxe dirigée contre le produit étranger, mais qui retombe, ne l’oublions jamais, sur le consommateur national. Or le consommateur, c’est le

  1. Voir Harmonies, ch. xvii. (Note de l’éditeur.)