Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/278

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Sous le régime de l’usure, la fortune de l’ouvrier décroît en raison directe de son travail, tandis que celle du propriétaire-capitaliste augmente en raison directe de sa consommation improductive : — Cette proposition, démontrée comme la précédente, mathématiquement, répond à toutes les divagations des jésuites, malthusiens et philanthropes, sur l’inégalité des talents, les compensations de l’autre vie, etc., etc.

Comme corollaire à ce qui précède, et en nous basant toujours sur la logique des chiffres, nous disons encore :

Dans la société capitaliste, l’ouvrier ne pouvant jamais racheter son produit pour le prix qu’il l’a vendu, est constamment en déficit. D’où, nécessité pour lui de réduire indéfiniment sa consommation, et, par suite, nécessité pour la société entière de réduire indéfiniment la production ; partant, interdiction de la vie, obstacle à la formation des capitaux, comme des subsistances.

Dans la société mutuelliste, au contraire, l’ouvrier échangeant, sans retenue, produit contre produit, valeur contre valeur, ne supportant qu’un droit léger d’escompte largement compensé par l’excédant que lui laisse, au bout de l’année, son travail, l’ouvrier profite exclusivement de son produit. D’où, faculté pour lui de produire indéfiniment, et, pour la société, accroissement indéfini de la vie et de la richesse.

Diriez-vous qu’une pareille révolution dans les rapports économiques ne ferait, après tout, que déplacer la misère ; qu’au lieu de la misère du travailleur salarié, qui ne peut racheter son propre produit, et qui devient d’autant plus pauvre qu’il travaille davantage, nous aurions la misère du propriétaire-capitaliste-entrepreneur, qui se verrait forcé d’entamer son capital, et, partant, de détruire incessamment, avec la matière du produit, l’instrument du travail même ?