Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/297

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phénomène étrange que j’ai signalé, je veux dire l’abandon volontaire des intérêts, auxquels se soumettent les détenteurs successifs de ces billets, profiterait au public sous forme de réduction dans le taux des escomptes. Pour être plus précis, je dirai que l’intérêt d’un billet de 1,000 fr. mis en circulation, se partagerait. Une partie irait à la Banque pour couvrir la somme qu’elle est obligée de tenir en réserve, les frais, et la rente de son capital primitif ; — l’autre partie serait forcée, par la concurrence, à se convertir en diminution d’escompte.

Et cela, prenez-y garde, ne veut pas dire que l’intérêt tendra à devenir gratuit ou à s’anéantir. Cela veut dire seulement qu’il tendrait à être perçu par celui qui y a droit.

Mais le privilége est intervenu qui en a disposé autrement, et la Banque de France, n’ayant pas de concurrents, au lieu de retenir la partie, empoche le tout.

Je voudrais, Monsieur, montrer la liberté des banques sous un autre aspect ; mais cette lettre est déjà trop longue. Je me bornerai à indiquer ma pensée.

Ce qu’on nomme vulgairement l’intérêt[1] comprend trois éléments qu’on a trop l’habitude de confondre :

1° L’intérêt proprement dit, qui est la rémunération du délai, le prix du temps ;

2° Les frais de circulation ;

3° La prime d’assurance.

La liberté des banques agirait à la fois d’une manière favorable, et dans le sens de la réduction, sur ces trois éléments. Elle maintiendrait au taux le plus bas, par les raisons que j’ai dites, l’intérêt proprement dit, sans jamais l’anéantir. Elle ferait tomber les frais de circulation à un chiffre qui, dans la pratique, se confondrait avec zéro. Enfin

  1. Quant à la rémunération du capital indépendante de la circonstance du prêt, voyez, à la quatrième lettre, les pages 140 et suiv. (Note de l’éditeur.)