Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/370

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

résulte précisément de ce qu’elle est libre. — À la vérité, le consommateur est obligé de rembourser au commerce ses frais de transports, de transbordements, de magasinage, de commission, etc. ; mais dans quel système ne faut-il pas que celui qui mange le blé rembourse les frais qu’il faut faire pour qu’il soit à sa portée ? Il y a de plus à payer la rémunération du service rendu ; mais, quant à sa quotité, elle est réduite au minimum possible par la concurrence ; et, quant à sa justice, il serait étrange que les artisans de Paris ne travaillassent pas pour les négociants de Marseille, quand les négociants de Marseille travaillent pour les artisans de Paris.

Que, selon l’invention socialiste, l’État se substitue au commerce, qu’arrivera-t-il ? Je prie qu’on me signale où sera, pour le public, l’économie. Sera-t-elle dans le prix d’achat ? Mais qu’on se figure les délégués de quarante mille communes arrivant à Odessa à un jour donné et au jour du besoin ; qu’on se figure l’effet sur les prix. Sera-t-elle dans les frais ? Mais faudra-t-il moins de navires, moins de marins, moins de transbordements, moins de magasinages, ou sera-t-on dispensé de payer toutes ces choses ? Sera-t-elle dans le profit des négociants ? Mais est-ce que vos délégués fonctionnaires iront pour rien à Odessa ? Est-ce qu’ils voyageront et travailleront sur le principe de la fraternité ? Ne faudra-t-il pas qu’ils vivent ? ne faudra-t-il pas que leur temps soit payé ? Et croyez-vous que cela ne dépassera pas mille fois les deux ou trois pour cent que gagne le négociant, taux auquel il est prêt à souscrire ?

Et puis, songez à la difficulté de lever tant d’impôts, de répartir tant d’aliments. Songez aux injustices, aux abus inséparables d’une telle entreprise. Songez à la responsabilité qui pèserait sur le gouvernement.

Les socialistes qui ont inventé ces folies, et qui, aux jours de malheur, les soufflent dans l’esprit des masses, se décer-