Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/424

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viendra interrompre vos froides élucubrations, et alors, je vous le demande à vous-mêmes, qu’adviendra-t-il de cet équilibre et de ce crédit qui sont, à vos yeux, le sublime de l’art et le terme de tout effort intelligent ?

Je crois donc que les hommes pratiques perdent complétement de vue le troisième but (et le premier en importance) que j’ai assigné à la réforme financière, à savoir : soulager le contribuable, faire aimer la République.

Nous en avons eu une preuve récente. L’Assemblée nationale a réduit l’impôt du sel et la taxe des lettres. Eh bien ! non-seulement les financiers désapprouvent ces mesures, mais encore ils ne peuvent pas se mettre dans la tête que l’Assemblée ait agi conformément à sa propre volonté. Ils supposent toujours, et de très-bonne foi, qu’elle a été victime d’une surprise et qu’elle la déplore, tant toute idée de réforme leur répugne.

À Dieu ne plaise que je veuille insinuer par là que la coopération des financiers est à repousser ! Quelle que soit l’idée nouvelle qui surgisse, elle ne peut guère être mise en œuvre que par le concours de leur utile expérience. Mais il est probable qu’elle ne surgira pas dans leur cerveau. Ils ont trop vécu pour cela dans les errements du passé. Si, avant les campagnes d’Italie, Napoléon avait usé trente années de sa vie à étudier et appliquer toutes les combinaisons de l’ancienne stratégie, croit-on qu’il eût été frappé de cette inspiration qui a révolutionné l’art de la guerre et jeté un si grand éclat sur les armes françaises ?

À côté de cette école pleine de jours et d’expérience, qui offrira à l’exécution des ressources précieuses, mais d’où ne jaillira pas, je le crains, l’idée féconde que la France attend pour son salut, sa gloire et sa sécurité, il y a une autre école ou plutôt un nombre à peu près infini d’autres écoles, aux idées desquelles, si l’on peut reprocher quelque chose, ce n’est pas du moins de manquer de nouveauté. Je n’ai pas