Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/446

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mal au-dessus des autres d’une manière permanente. Il y a ensuite, dans le moyen imaginé pour réaliser l’injustice, c’est-à-dire dans la protection, ce vice radical qu’elle implique une perte définitive de richesse totale ; et, de ces deux circonstances, il suit que le niveau du bien-être baisse partout, même au sein des industries protégées, comme celui de l’eau, même au sein de l’avide et stupide réservoir.

Je savais bien que le Libre-Échange m’entraînerait hors de ma voie. Passion ! passion ! ton empire est irrésistible ! Mais revenons au fisc.

Je dirai aux protectionistes : ne consentirez-vous pas, en vue des nécessités impérieuses de la République, à mettre quelque borne à votre avidité ? Quoi ! quand le Trésor est aux abois, quand la banqueroute menace d’engloutir votre fortune et votre sécurité, quand la douane nous offre une planche de salut vraiment providentielle, quand elle peut remplir les caisses publiques sans nuire aux masses, mais au contraire en les soulageant du poids qui les opprime, serez-vous inflexibles dans votre égoïsme ? Vous devriez, de vous-mêmes, dans ce moment solennel et décisif, faire sur l’autel de la patrie le sacrifice, — ce que vous appelez et ce que très-sincèrement vous croyez être — le sacrifice d’une partie de vos priviléges. Vous en seriez récompensés par l’estime publique, et, j’ose le prédire, la prospérité matérielle vous serait donnée par surcroît.

Est-ce donc trop exiger que de vous demander de substituer aux prohibitions, devenues incompatibles avec notre loi constitutionnelle, des droits de 20 à 30 pour cent ? une réduction de moitié au tarif du fer et de l’acier, ces muscles du travail ; de la houille, ce pain de l’industrie ; de la laine, du lin, du coton, ces matériaux de la main-d’œuvre ; du blé et de la viande, ces principes de force et de vie ?