Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 5.djvu/560

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

prouve l’exemple des États-Unis. Avec l’article 79, il n’est pour les peuples qu’un enchaînement d’illusions et de déceptions.

Et comment en serait-il autrement ? Les hommes ont rêvé de grandeur, d’influence, de fortune et de gloire. Qui n’y rêve quelquefois ? Tout à coup le vent de l’élection les jette dans l’enceinte législative. Si la constitution du pays leur disait : « Tu y entres représentant et tu y resteras représentant, » quel intérêt auraient-ils, je le demande, à tourmenter, entraver, déconsidérer et renverser le pouvoir ? Mais, loin de leur tenir ce langage, elle dit à l’un : « Le ministre a besoin de grossir ses phalanges, et il dispose de hautes positions politiques que je ne t’interdis pas ; » à l’autre : « Tu as de l’audace et du talent, voilà le banc des ministres ; si tu parviens à les en chasser, ta place y est marquée. »

Alors, et cela est infaillible, alors commencent ces tumultes d’accusations furieuses, ces efforts inouïs pour mettre de son côté la force d’une popularité éphémère, cet étalage fastueux de principes irréalisables, quand on attaque, et de concessions abjectes, quand on se défend. Ce n’est que piéges et contre-piéges, feintes et contre-feintes, mines et contre-mines. La politique devient une stratégie. Les opérations se poursuivent au dehors, dans les bureaux, dans les commissions, dans les comités. Le moindre petit accident parlementaire, une élection de questeur est un symptôme qui fait palpiter les cœurs de crainte ou d’espérance ; s’il s’agissait du Code civil lui-même, on n’y prendrait pas tant d’intérêt. On voit se liguer les éléments les plus hétérogènes et se dissoudre les plus naturelles alliances. Ici, l’esprit de parti forme une coalition. Là, la souterraine habileté ministérielle en fait échouer une autre. S’agit-il d’une loi d’où dépend le bien-être du peuple, mais qui n’implique pas la question de confiance, la salle est déserte. En revanche, tout événement que le temps amène, portât-il dans ses flancs une conflagra-