Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

écueils, plus, sans doute, on sera porté à ne voir dans cette délicate discussion que de stériles et oiseuses subtilités, bonnes tout au plus à satisfaire la curiosité des hommes du métier.

Vous recherchez laborieusement, me dira-t-on, si la richesse est dans l’utilité des choses, ou dans leur valeur ou dans leur rareté. N’est-ce pas une question, comme celle de l’école : La forme est-elle dans la substance ou dans l’accident ? Et ne craignez-vous pas qu’un Molière de carrefour ne vous expose aux risées du public des Variétés ?

Et cependant, je dois le dire : au point de vue économique, Société c’est Échange. La première création de l’échange, c’est la notion de valeur, en sorte que toute vérité ou toute erreur introduite dans les intelligences par ce mot est une vérité ou une erreur sociale.

J’entreprends de montrer dans cet écrit l’Harmonie des lois providentielles qui régissent la société humaine. Ce qui fait que ces lois sont harmoniques et non discordantes, c’est que tous les principes, tous les mobiles, tous les ressorts, tous les intérêts concourent vers un grand résultat final, que l’humanité n’atteindra jamais à cause de son imperfection native, mais dont elle approchera toujours en vertu de sa perfectibilité indomptable ; et ce résultat est : le rapprochement indéfini de toutes les classes vers un niveau qui s’élève toujours ; en d’autres termes : l’égalisation des individus dans l’amélioration générale.

Mais pour réussir il faut que je fasse comprendre deux choses, savoir :

1° Que l’Utilité tend à devenir de plus en plus gratuite, commune, en sortant progressivement du domaine de l’appropriation individuelle ;

2° Que la Valeur, au contraire, seule appropriable, seule constituant la propriété de droit et de fait, tend à diminuer