Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/216

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ressources, de meilleurs outils, des capitaux moins exigeants, une division du travail mieux entendue. Or, s’adressant au détenteur de la coupe, celui qui la désire ne dit pas : Faites-moi savoir quel est, en quantité et qualité, le travail qu’elle vous a coûté afin que je vous rémunère en conséquence. Non, il dit : Aujourd’hui, grâce aux progrès de l’art, je puis faire moi-même ou me procurer par l’échange une coupe semblable, avec tant de travail de telle qualité ; et c’est la limite de la rémunération que je consens à vous donner.

Il résulte de là que toute valeur incorporée, autrement dit tout travail accumulé, ou tout capital tend à se déprécier devant les services naturellement perfectibles et progressivement productifs ; et que, dans l’échange du travail actuel contre du travail antérieur, l’avantage est généralement du côté du travail actuel, ainsi que cela doit être puisqu’il rend plus de services.

Et c’est pour cela qu’il y a quelque chose de si vide dans les déclamations que nous entendons diriger sans cesse contre la valeur des propriétés foncières :

Cette valeur ne diffère en rien des autres, ni par son origine ni par sa nature, ni par la loi générale de sa lente dépréciation.

Elle représente des services anciens : desséchements, défrichements, épierrements, nivellements, clôtures, accroissement des couches végétales, bâtisses, etc. ; elle est là pour réclamer les droits de ces services. Mais ces droits ne se règlent pas par la considération du travail exécuté. Le propriétaire foncier ne dit pas : « Donnez-moi en échange de cette terre autant de travail qu’elle en a reçu » (c’est ainsi qu’il s’exprimerait si, selon la théorie de Smith, la valeur venait du travail et lui était proportionnelle). Encore moins vient-il dire, comme le supposent Ricardo et nombre d’économistes : « Donnez-moi d’abord autant de travail que ce