Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/480

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leçons plus rudes de l’expérience ; et l’on peut déjà prévoir que cette nation, qui se jetait naguère dans les emprunts américains, dans les mines du Mexique, dans les entreprises de chemins de fer avec une si moutonnière crédulité, sera beaucoup moins dupe que d’autres des illusions californiennes.

Que dirai-je du Libre Échange, dont le triomphe est dû à Cobden[1], non à Robert Peel ; car l’apôtre aurait toujours fait surgir un homme d’État, tandis que l’homme d’État ne pouvait se passer de l’apôtre  ? Voilà une puissance nouvelle dans le monde, et qui portera, j’espère, un rude coup à ce monstre qu’on nomme chômage. La restriction a pour tendance et pour effet (elle ne le nie pas) de placer plusieurs industries du pays, et par suite une partie de sa population, dans une situation précaire. Comme ces vagues amoncelées, qu’une force passagère tient momentanément au-dessus du niveau de la mer, aspirent incessamment à descendre, de même ces industries factices, environnées de toute part d’une concurrence victorieuse, menacent sans cesse de s’écrouler. Que faut-il pour déterminer leur chute  ? Une modification dans l’un des articles d’un des innombrables tarifs du monde. De là une crise. En outre, les variations de prix sur une denrée sont d’autant plus grandes que le cercle de la concurrence est plus étroit. Si l’on entourait de douanes un département, un arrondissement, une commune, on rendrait les fluctuations des prix considérables. La liberté agit sur le principe des assurances. Elle compense, pour les divers pays et pour les diverses années, les mauvaises récoltes par les bonnes. Elle maintient les prix rapprochés d’une moyenne ; elle est donc une force de nivellement et d’équilibre. Elle concourt à la stabilité ; donc elle combat l’instabilité, cette grande source des crises et

  1. Voir tome III, pages 442 à 445. (Note de l’éditeur.)