Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/69

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confondent toujours et nécessairement dans la même individualité. Il est impossible de les concevoir séparés. On peut concevoir une sensation non satisfaite, un besoin inassouvi ; jamais personne ne comprendra le besoin dans un homme et sa satisfaction dans un autre.

S’il en était de même pour le terme moyen, l’Effort, l’homme serait un être complétement solitaire. Le phénomène économique s’accomplirait intégralement dans l’individu isolé. Il pourrait y avoir une juxtaposition de personnes, il n’y aurait pas de société. Il pourrait y avoir une Économie personnelle, il ne pourrait exister d’Économie politique.

Mais il n’en est pas ainsi. Il est fort possible et fort fréquent que le Besoin de l’un doive sa Satisfaction à l’Effort de l’autre. C’est un fait. Si chacun de nous veut passer en revue toutes les satisfactions qui aboutissent à lui, il reconnaîtra qu’il les doit, pour la plupart, à des efforts qu’il n’a pas faits ; et de même, le travail que nous accomplissons, chacun dans notre profession, va presque toujours satisfaire des désirs qui ne sont pas en nous.

Ceci nous avertit que ce n’est ni dans les besoins ni dans les satisfactions, phénomènes essentiellement personnels et intransmissibles, mais dans la nature du terme moyen, des Efforts humains, qu’il faut chercher le principe social, l’origine de l’économie politique.

C’est, en effet, cette faculté donnée aux hommes, et aux hommes seuls, entre toutes les créatures, de travailler les uns pour les autres ; c’est cette transmission d’efforts, cet échange de services, avec toutes les combinaisons compliquées et infinies auxquelles il donne lieu à travers le temps et l’espace, c’est là précisément ce qui constitue la science économique, en montre l’origine et en détermine les limites.

Je dis donc :

Forment le domaine de l’économie politique tout effort sus-