Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 7.djvu/364

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au clergé ; je ne dois pas déguiser ma pensée même pour m’attirer des suffrages dont je pourrais à bon droit m’honorer.

Il est vrai que j’ai écrit que chacun devrait concourir librement à soutenir le culte qu’il professe ; cette opinion, je l’ai exprimée et je la soutiendrai comme publiciste et comme législateur, sans entêtement cependant, et jusqu’à ce que de bonnes raisons me fassent changer. Ainsi que je l’ai dit dans ma profession de foi[1], mon idéal c’est la justice universelle. Les rapports de l’Église et de l’État ne me semblent pas fondés actuellement sur la justice : d’une part on force les catholiques à salarier les cultes protestant et judaïque, avant peu vous payerez peut-être l’abbé Châtel, — cela peut froisser quelques consciences ; d’un autre côté, l’État se prévaut de ce qu’il dispose de votre budget pour intervenir dans les affaires du clergé ou pour y exercer une influence que je n’admets pas. Il est pour quelque chose dans la nomination des évêques, des chanoines, des curés de canton ; et certes la république peut prendre une direction telle, que ce joug ne vous plaira plus. Cela me paraît contraire à la liberté et multiplie entre la puissance temporelle et la puissance spirituelle de dangereux points de contact.

En outre, j’ai foi dans une fusion future entre toutes les religions chrétiennes, ou, si vous voulez, dans l’absorption des sectes dissidentes par le catholicisme. Mais pour cela il ne faut pas que les Églises soient des institutions politiques. Vous ne pouvez nier que le rôle attribué à Victoria, dans la religion anglicane, et à Nicolas, dans la religion russe, ne soit un grand obstacle à la réunion de tout le troupeau sous un même pasteur.

Quant à l’objection tirée de la situation où placerait trente

  1. Celle du 22 mars 1848. (Œuvres complètes, t. I, p. 506.)