Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 7.djvu/46

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7. — 2e ARTICLE[1].


J’en suis resté à l’esprit de parti. Il semble assez inutile de s’en occuper déjà. Hélas ! notre Ligue est à naître ; à quoi sert de prévoir le temps où l’on recherchera son alliance ? Mais c’est avant d’élever l’édifice qu’il faut s’assurer de la qualité des matériaux. Les destinées de la Ligue se ressentiront toujours de l’esprit de ses fondateurs. Faible et chancelante, s’ils flottent au gré de toutes les doctrines économiques ; factieuse, isolée, n’ayant de puissance que pour le mal, s’ils rêvent d’avance autre chose que son principe avoué. — Ligue, triomphe, principe, liberté, vous n’êtes peut-être que les fantômes adorés d’une imagination trop facile à se laisser séduire à tout ce qui offre l’image du bien public ! Mais il n’est pas impossible, puisque cela s’est vu ailleurs, que ces fantômes se revêtent de réalité. Ce qui est impossible, tout à fait impossible, c’est que la Ligue puisse avoir force, vie, influence utile, si elle se laisse entamer par l’esprit de parti.

La Ligue ne doit être ni monarchique, ni républicaine, ni orthodoxe, ni dissidente ; elle n’intervient ni dans les hautes questions métaphysiques de légitimité, de souveraineté du peuple, ni dans la polémique dont le Texas, le Liban et le Maroc font les frais. Son royaume n’est pas de ce monde qu’on nomme politique ; c’est un terrain neutre où M. Guizot peut donner la main à M. Garnier Pagès, M. Berryer à M. Duchâtel, et l’Évêque de Chartres à M. Cousin. Elle ne provoque ni n’empêche les crises ministérielles, elle ne s’en mêle pas et ne s’y intéresse même pas. Elle n’a qu’un objet en vue : la liberté des échanges. Cette li-

  1. Mémorial bordelais du 9 février 1846. (Note de l’édit.)