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Page:Œuvres complètes de François Villon.djvu/131

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DE FRANÇOIS VILLON.

LA REQUESTE DE VILLON
Présentée à la Cour de Parlement, en forme de ballade.

Tous mes cinq Sens, yeulx, oreilles et bouche,
Le nez, et vous, le sensitif, aussi ;
Tous mes membres où il y a reprouche,
En son endroit ung chascun die ainsi :
« Court souverain, par qui sommes icy,
Vous nous avez gardé de desconfire ;
Or, la langue ne eut assez suffire
À vous rendre suffisantes louenges :
Si prions tous, fille au souverain Sire,
Mère des bons, et sœur des benoistz anges ! »

Cueur, fendez-vous, ou percez d’une broche,
Et ne soyez, au moins, plus endurcy
Qu’au desert fut la forte bise roche
Dont le peuple des Juifs fut adoulcy ;
Fondez larmes, et venez à mercy,
Comme humble cueur qui tendrement souspire :
Louez la Court, conjoincte au sainct Empire,
L’heur des Françoys, le confort des estranges,
Procreée la sus au ciel empire,
Mère des bons, et sœur des benoistz anges !

Et vous, mes dentz, chascune si s’esloche ;
Saillez avant, rendez toutes mercy,
Plus haultement qu’orgue, trompe, ne cloche,
Et de mascher n’ayez ores soulcy ;
Considerez que je fusse transy,
Foye, pommon, et rate qui respire ;