Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, X.djvu/110

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de travailler comme je le fais si je n’en recueille aucun fruit ? »

La grosse tête de M. Torchebeuf parut froissée : « Je vous ai déjà dit, monsieur Lesable, que je n’admettais point de discussion de cette nature entre nous. Je vous répète encore que je trouve inconvenante votre réclamation, étant donné votre fortune actuelle comparée à la pauvreté de vos collègues… »

Lesable ne put se contenir : « Mais je n’ai rien, monsieur ! Notre tante a laissé sa fortune au premier enfant qui naîtrait de mon mariage. Nous vivons, mon beau-père et moi, de nos traitements. »

Le chef, surpris, répliqua : « Si vous n’avez rien aujourd’hui, vous serez riche, dans tous les cas, au premier jour. Donc, cela revient au même. »

Et Lesable se retira, plus atterré de cet avancement perdu que de l’héritage imprenable.

Mais comme Cachelin venait d’arriver à son bureau, quelques jours plus tard, le beau Maze entra avec un sourire sur les lèvres, puis Pitolet parut, l’œil allumé, puis Boissel poussa la porte et s’avança d’un air excité, ricanant, et jetant aux autres des regards de connivence. Le père Savon copiait toujours, sa pipe de terre au coin de la bouche, assis