Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, X.djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Seule, Cora paraissait tout à fait tranquille, tout à fait heureuse, tout à fait radieuse. Elle avait oublié, semblait-il, le terme menaçant et si proche.

On atteignit mars. Tout espoir semblait perdu, car il y aurait trois ans, au vingt juillet, que tante Charlotte était morte.

Un printemps précoce faisait germer la terre ; et Maze proposa à ses amis de faire une promenade au bord de la Seine, un dimanche, pour cueillir des violettes dans les buissons.

Ils partirent par un train matinal et descendirent à Maisons-Laffitte. Un frisson d’hiver courait encore dans les branches nues, mais l’herbe reverdie, luisante, était déjà tachée de fleurs blanches et bleues ; et les arbres fruitiers sur les coteaux semblaient enguirlandés de roses, avec leurs bras maigres couverts de bourgeons épanouis.

La Seine, lourde, coulait, triste et boueuse des pluies dernières, entre ses berges rongées par les crues de l’hiver ; et toute la campagne trempée d’eau, semblant sortir d’un bain, exhalait une saveur d’humidité douce sous la tiédeur des premiers jours de soleil.

On s’égara dans le parc. Cachelin, morne, tapait de sa canne des mottes de terre, plus accablé que de coutume, songeant plus amèrement, ce jour-là, à leur infortune bientôt