Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, XVI.djvu/232

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ouvertes, jouait avec une pomme de terre qu’il laissait parfois tomber dans sa robe, tandis que cinq femmes, courbées et la croupe en l’air, piquaient des brins de colza dans la plaine voisine. D’un mouvement leste et continu, tout le long du grand bourrelet de terre que la charrue venait de retourner, elles enfonçaient une pointe de bois, puis jetaient aussitôt dans ce trou la plante un peu flétrie déjà qui s’affaissait sur le côté ; puis elles recouvraient la racine et continuaient leur travail.

Un homme qui passait, un fouet à la main et les pieds nus dans des sabots, s’arrêta près de l’enfant, le prit et l’embrassa. Alors une des femmes se redressa et vint à lui. C’était une grande fille rouge, large du flanc, de la taille et des épaules, une haute femelle normande, aux cheveux jaunes, au teint de sang.

Elle dit, d’une voix résolue :

— Te v’là, Césaire, eh ben ?

L’homme, un garçon maigre à l’air triste, murmura :

— Eh ben, rien de rien, toujou d’même !

— I ne veut pas ?

— I ne veut pas.

— Qué que tu vas faire ?

— J’sais ti ?