— Henri IV est mort, lui repartit vivement son compagnon. Encore si tu disais qu’elle sent la vanille, tu émettrais une opinion nouvelle.
— Vous croyez rire, répondit Mistigris : eh bien, ça rappelle par moments la vanille.
— Dans le Levant… dit Georges en voulant entamer une histoire.
— Dans le vent, fit le maître à Mistigris en interrompant Georges.
— Je dis dans le Levant, d’où je reviens, reprit Georges, la poussière sent très bon ; mais ici, elle ne sent quelque chose que quand il se rencontre un dépôt de poudrette comme celui-ci.
— Monsieur vient du Levant ? dit Mistigris d’un air narquois.
— Tu vois bien que monsieur est si fatigué, qu’il s’est mis sur le Ponant, lui répondit son maître.
— Vous n’êtes pas très bruni par le soleil ? dit Mistigris.
— Oh ! je sors de mon lit après une maladie de trois mois, dont le germe était, disent les médecins, une peste rentrée.
— Vous avez eu la peste ! s’écria le comte en faisant un geste d’effroi. Pierrotin, arrêtez !
— Allez, Pierrotin, répéta Mistigris. On vous dit qu’elle est rentrée, la peste, dit-il en interpellant monsieur de Sérisy. C’est une peste qui passe en conversation.
— Une peste de celles dont on dit : Peste ! s’écria le maître.
— Ou : Peste soit du bourgeois ! reprit Mistigris.
— Mistigris ! reprit le maître, je vous mets à pied si vous vous faites des affaires. Ainsi, dit-il en se tournant vers Georges, monsieur est allé dans l’Orient ?
— Oui, monsieur, d’abord en Égypte, et puis en Grèce où j’ai servi Ali, pacha de Janina, avec qui j’ai eu une terrible prise de bec. ─ On ne résiste pas à ces climats-là. ─ Aussi les émotions de tout genre que donne la vie orientale m’ont-elles désorganisé le foie.
— Ah ! vous avez servi ? dit le gros fermier. Quel âge avez-vous donc ?
— J’ai vingt-neuf ans, reprit Georges que tous les voyageurs regardèrent. À dix-huit ans, je suis parti simple soldat pour la fameuse campagne de 1813 ; mais je n’ai vu que le combat d’Hanau et j’y ai gagné le grade de sergent-major. En France, à Montereau, je