Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, IV.djvu/535

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sieur sa place, et mettez-le au fait des habitudes de notre travail.

Le lendemain, le clerc trouva le livre en travers sur sa pancarte ; mais, après en avoir parcouru les premières pages, il se mit à rire, n’invita point l’Étude, et le replaça devant lui.

— Messieurs, dit-il au moment de s’en aller vers cinq heures, j’ai un cousin premier clerc de notaire chez maître Léopold Hannequin, je le consulterai sur ce que je dois faire pour ma bienvenue.

— Cela va mal, s’écria Godeschal, il n’a pas l’air d’un novice, le futur magistrat !

— Nous le taonnerons, dit Oscar.

Le lendemain à deux heures, Oscar vit entrer et reconnut dans la personne du maître clerc d’Hannequin, Georges Marest.

— Hé ! voilà l’ami d’Ali-Pacha, s’écria-t-il d’un air dégagé.

— Tiens ! vous voilà ici, monsieur l’ambassadeur, répondit Georges en se rappelant Oscar.

— Eh ! vous vous connaissez donc ? demanda Godeschal à Georges.

— Je le crois bien, nous avons fait des sottises ensemble, dit Georges, il y a de cela plus de deux ans… Oui, je suis sorti de chez Crottat pour entrer chez Hannequin, précisément à cause de cette affaire…

— Quelle affaire ? demanda Godeschal.

— Oh ! rien, répondit Georges à un signe d’Oscar. Nous avons voulu mystifier un pair de France, et c’est lui qui nous a roulés… Ah çà ! vous voulez donc tirer une carotte à mon cousin…

— Nous ne tirons pas de carottes, dit Oscar avec dignité, voici notre charte.

Et il présenta le fameux registre à la place où se trouvait une sentence d’exclusion portée contre un réfractaire qui, pour fait de ladrerie, avait été forcé de quitter l’Étude en 1788.

— Je crois bien que c’est une carotte, car en voici les racines, répliqua Georges en désignant ces bouffonnes archives. Mais mon cousin et moi, nous sommes riches, nous vous flanquerons une fête comme vous n’en aurez jamais eu, et qui stimulera votre imagination au procès-verbal. À demain, dimanche, au Rocher de Cancale, à deux heures. Après, je vous mènerai passer la soirée chez madame la marquise de las Florentinas y Cabirolos, où nous jouerons et où vous trouverez l’élite des femmes de la fashion. Ainsi, messieurs de la Première Instance, reprit-il avec une morgue notariale, de la tenue, et sachez porter le vin comme les seigneurs de la Régence…