Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, VI.djvu/45

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— Chapeloud. Il m’a tout pris.

— Poirel donc ?

— Non, Troubert.

Enfin, ils arrivèrent à l’Alouette, où les amis du prêtre lui prodiguèrent des soins si empressés, que, vers le soir, ils le calmèrent, et purent obtenir de lui le récit de ce qui s’était passé pendant la matinée.

Le flegmatique propriétaire demanda naturellement à voir l’acte qui, depuis la veille, lui paraissait contenir le mot de l’énigme. Birotteau tira le fatal papier timbré de sa poche, le tendit à monsieur de Bourbonne, qui le lut rapidement, et arriva bientôt à une clause ainsi conçue : « Comme il se trouve une différence de huit cents francs par an entre la pension que payait feu monsieur Chapeloud et celle pour laquelle ladite Sophie Gamard consent à prendre chez elle, aux conditions ci-dessus stipulées, ledit François Birotteau ; attendu que le soussigné François Birotteau reconnaît surabondamment être hors d’état de donner pendant plusieurs années le prix payé par les pensionnaires de la demoiselle Gamard, et notamment par l’abbé Troubert ; enfin, eu égard à diverses avances faites par ladite Sophie Gamard soussignée, ledit Birotteau s’engage à lui laisser à titre d’indemnité le mobilier dont il se trouvera possesseur à son décès, ou lorsque, par quelque cause que ce puisse être, il viendrait à quitter volontairement, et à quelque époque que ce soit, les lieux à lui présentement loués, et à ne plus profiter des avantages stipulés dans les engagements pris par mademoiselle Gamard envers lui, ci-dessus… »

— Tudieu, quelle grosse ! s’écria le propriétaire, et de quelles griffes est armée ladite Sophie Gamard !

Le pauvre Birotteau, n’imaginant dans sa cervelle d’enfant aucune cause qui pût le séparer un jour de mademoiselle Gamard, comptait mourir chez elle. Il n’avait aucun souvenir de cette clause, dont les termes ne furent pas même discutés jadis, tant elle lui avait semblé juste, lorsque, dans son désir d’appartenir à la vieille fille, il aurait signé tous les parchemins qu’on lui aurait présentés. Cette innocence était si respectable, et la conduite de mademoiselle Gamard si atroce ; le sort de ce pauvre sexagénaire