miers jours de novembre, son feuilleton le rappelait à Paris. Avant déjeuner, la veille du départ projeté, le journaliste et Dinah virent arriver le petit La Baudraye avec un artiste de Nevers, un restaurateur de sculptures.
— De quoi s’agit-il ? dit Lousteau, que voulez-vous faire à votre château ?
— Voici ce que je veux, répondit le petit vieillard en emmenant le journaliste, sa femme et l’artiste de province sur la terrasse.
Il montra sur la façade, au-dessus de la porte d’entrée, un précieux cartouche soutenu par deux sirènes, assez semblable à celui qui décore l’arcade actuellement condamnée par où l’on allait jadis du quai des Tuileries dans la cour du vieux Louvre, et au-dessus de laquelle on lit : Bibliothèque du cabinet du Roi. Ce cartouche offrait le vieil écusson des d’Uxelles qui portent d’or et de gueules, à la fasce de l’un à l’autre, avec deux lions de gueules à dextre et d’or à senestre pour supports ; l’écu timbré du casque de chevalier, lambrequiné des émaux de l’écu et sommé de la couronne ducale. Puis pour devise : Cy paroist ! parole fière et sonnante.
— Je veux remplacer les armes de la maison d’Uxelles par les miennes ; et comme elles se trouvent répétées six fois dans les deux façades et dans les deux ailes, ce n’est pas une petite affaire.
— Vos armes d’hier ! s’écria Dinah, et après 1830 !…
— N’ai-je pas constitué un majorat ?
— Je concevrais cela si vous aviez des enfants, lui dit le journaliste.
— Oh ! répondit le petit vieillard, madame de La Baudraye est encore jeune, il n’y a pas encore de temps perdu.
Cette fatuité fit sourire Lousteau qui ne comprit pas monsieur de La Baudraye.
— Hé ! bien, Didine, dit-il à l’oreille de madame de La Baudraye, à quoi bon tes remords ?
Dinah plaida pour obtenir un jour de plus, et les deux amants se firent leurs adieux à la manière de ces théâtres qui donnent dix fois de suite la dernière représentation d’une pièce à recettes. Mais combien de promesses échangées ! combien de pactes solennels exigés par Dinah et conclus sans difficultés par l’impudent journaliste ! Avec la supériorité d’une femme supérieure, Dinah con-