Page:Œuvres complètes de H. de Balzac, X.djvu/429

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affaires, sans être privé du droit de faire faillite des dividendes promis, arrière-petite-faillite qui se voit souvent, comme un enfant mis au jour par une mère neuf mois après le mariage de sa fille.

Si le Concordat ne prend pas, les créanciers nomment alors des Syndics définitifs, prennent des mesures exorbitantes en s’associant pour exploiter les biens, le commerce de leur débiteur, saisissant tout ce qu’il aura, la succession de son père, de sa mère, de sa tante, etc. Cette rigoureuse mesure s’exécute au moyen d’un contrat d’union.

Il y a donc deux faillites : la faillite du négociant qui veut ressaisir les affaires, et la faillite du négociant qui, tombé dans l’eau, se contente d’aller au fond de la rivière. Pillerault connaissait bien cette différence. Il était, selon lui, comme selon Ragon, aussi difficile de sortir pur de la première que de sortir riche de la seconde. Après avoir conseillé l’abandon général, il alla s’adresser au plus honnête Agréé de la place pour le faire exécuter en liquidant la faillite et remettant les valeurs à la disposition des créanciers. La loi veut que les créanciers donnent, pendant la durée de ce drame, des aliments au failli et à sa famille. Pillerault fit savoir au Juge-Commissaire qu’il pourvoirait aux besoins de sa nièce et de son neveu.

Tout avait été combiné par du Tillet pour rendre la faillite une agonie constante à son ancien patron. Voici comment. Le temps est si précieux à Paris que généralement dans les faillites, de deux Syndics, un seul s’occupe des affaires… L’autre est pour la forme : il approuve, comme le second notaire dans les actes notariés. Le Syndic agissant se repose assez souvent sur l’Agréé. Par ce moyen, à Paris, les faillites du premier genre se mènent si rondement que, dans les délais voulus par la loi, tout est baclé, ficelé, servi, arrangé ! En cent jours, le Juge-Commissaire peut dire comme le ministre : L’ordre règne à Varsovie.

Du Tillet voulait la mort commerciale du parfumeur. Aussi le nom des Syndics nommés par l’influence de du Tillet fut-il significatif pour Pillerault. Monsieur Bidault, dit Gigonnet, principal créancier, devait ne s’occuper de rien ; Molineux, le petit vieillard tracassier qui ne perdait rien, devait s’occuper de tout. Du Tillet avait jeté à ce petit chacal ce noble cadavre commercial à tourmenter en le dévorant.

Après l’assemblée où les créanciers nommèrent le syndicat, le