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ÉLOGE DE LA ROSE[1]



La Rose croît pour tous les hommes, mais tous les hommes ne sont pas faits pour sentir ses charmes, le vulgaire y voit une fleur dont les couleurs plaisent à la vue et dont le parfum flatte agréablement l’odorat ; le fleuriste imbécille ose lui préférer des fleurs dont la rareté fait le principal mérite ; l’amant plus raisonnable, la considère avec complaisance comme l’image touchante des charmes les plus intéressants de celle qu’il aime, mais il n’appartient qu’a un très petit nombre d’êtres privilégiés de l’aimer pour elle-même et de lui rendre un hommage digne d’elle.

Parmi cette foule d’hommes automates qui, pleins d’une stupide admiration pour les biens méprisables que l’opinion a créés, contemplent avec une coupable indifférence les plus magnifiques ouvrages de la nature, et à qui la vue d’une rose n’a jamais rien inspiré, l’éternelle providence a fait naître et perpétuer une race choisie d’hommes sensibles et généreux qui la vengent de leur mépris par un culte aussi sincère qu’intéressant. La Rose ne s’offre jamais à leurs yeux sans réveiller en eux mille idées riantes, mille sensations délicieuses qui ne sont connues que des âmes délicates.

  1. Ce discours, écrit pour la réception d’un membre de la société des Rosati, a été publié par M. Lucien Peise dans Quelques vers de Maximilien Robespierre, page 35 et suiv., Gougy, éditeur à Paris.

    Le manuscrit original est fait d’un cahier de 14 pages blanches, petit in-4o portant ce filigrane : M. Homo.

    Le texte est surchargé de ratures et de corrections ; de nombreuses phrases sont effacées, puis rétablies et il est intéressant de suivre, sur ce manuscrit, les diverses étapes de la pensée de l’auteur.

    Nous publions, d’après M. Lucien Peise, le texte définitif auquel s’arrêta Robespierre.