Aller au contenu

Page:Œuvres complètes de Platon, série 3, tome 1, Dialogues dogmatiques (trad. Dacier et Grou), 1866.djvu/406

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

paroles, que l’Amour est ce qui est aimé et non ce qui aime. Voilà, je pense, pourquoi l’Amour te semblait très-beau ; car ce qui est aimable est la beauté réelle, la grâce, la perfection et le souverain bien. Mais ce qui aime est d’une tout autre nature, comme je viens de l’expliquer. — Eh bien, soit, étrangère, tu raisonnes fort bien : mais l’Amour étant tel que tu viens de le dire, de quelle utilité est-il aux hommes ? — C’est là, Socrate, ce que je vais à présent tâcher de t’apprendre. Nous connaissons la nature et l’origine de l’Amour : il est, comme tu le dis, l’amour du beau. Mais si quelqu’un nous demandait : Qu’est-ce que l’amour du beau, Socrate et Diotime ; ou, pour parler plus clairement, celui qui aime le beau, qu’aime-t-il ? — À le posséder, répondis-je. Cette réponse appelle une nouvelle question, dit-elle : que lui reviendra-t-il de posséder le beau ? — Je repartis que je n’étais pas en état de répondre immédiatement à cette question. — Mais, reprit-elle, si l’on changeait de terme, et que, mettant le bon à la place du beau, on te demandât : Socrate, celui qui aime le bon, qu’aime-t-il ? — À le posséder. — Et que lui reviendra-t-il de le posséder ? — Je trouve cette fois la réponse plus facile : c’est qu’il deviendra heureux. — Car c’est par la possession des bonnes choses que les êtres heureux sont heureux, et il n’est plus besoin de demander pourquoi celui qui veut être heureux veut l’être : ta réponse me semble satisfaire à tout. — Il est vrai, Diotime. — Mais penses-tu que cet amour et cette volonté soient communs à tous les hommes, et que