Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/506

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que tu es capable de louer Homère par art et par science, tu en uses mal avec moi. Tu m’assures que tu sais quantité de belles choses sur Homère, tu promets de me donner une audition, et tu m’en frustres, et, loin de tenir ta promesse, tu ne veux même pas dire les choses où tu excelles, bien que je t’en presse depuis longtemps. Tu fais absolument comme Protée, tu prends toute sorte de formes et te tournes en tous sens, tant qu’enfin, après m’avoir échappé, tu reparais comme général, afin de ne pas montrer combien tu es habile dans l’intelligence d’Homère. Aussi, je le répète, si ton habileté vient de la connaissance de l’art, et si, après avoir promis de me donner une audition sur Homère, tu m’en frustres, ton procédé est injurieux ; si au contraire ce n’est point par art, mais par une dispensation divine et une possession d’Homère que tu dis, sans rien comprendre, beaucoup de belles choses sur le poète, comme je disais que c’était ton cas, je n’ai rien à te reprocher. Choisis donc si tu veux passer à mes yeux pour un homme injurieux ou pour un homme divin.

Ion

La différence est grande, Socrate, car il est beaucoup plus beau de passer pour un homme divin.

Socrate

Garde donc le titre le plus beau, Ion : nous reconnaissons que tu es un homme divin et que tes beaux discours sur Homère ne doivent rien à l’art.