Page:Œuvres complettes de M. de Marivaux, tome 12, 1781.djvu/56

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Dans cette allée je lisois un livre qui me jetta dans de profondes réflexions sur les hommes.

Et de réflexions en réflexions, toujours marchant, toujours allant, je marchai tant, j’allai tant, je réfléchis tant, & si diversement, que sans prendre garde à ce que je devenois, sans observer par où je passois, je me trouvai insensiblement dans le pays dont je parlois tout-à-l’heure, où j’achevai de m’oublier, pour me livrer tout entier au plaisir d’examiner ce qui s’offroit à mes regards, & en effet, le spectacle étoit curieux. Il me sembla donc : mais je dis mal, il ne me sembla point ; je vis sûrement une infinité de fourneaux plus ou moins ardents, mais dont le feu ne m’incommodoit point, quoique j’en approchasse de fort près.

Je ne vous dirai pas à présent à quoi ils servoient ; il n’est pas encore temps.

Ce n’est pas là tout ; j’ai bien d’autres choses à vous raconter. Au milieu de tous les fourneaux étoit une personne, ou, si vous voulez, une Divinité, dont il me seroit inutile d’entreprendre le portrait ; aussi n’y tâcherai-je point.

Qu’il vous suffise de sçavoir que cette personne, ou cette Divinité, qui en gros me parut avoir l’air jeune, & cependant antique, étoit dans