Page:Œuvres de Bacon, II.djvu/95

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des comètes aient aucune chaleur sensible au tact ; il y a plus, c’est dans les pleines lunes qu’on observe les froids les plus âpres. Cependant l’on croit communément que les plus grandes étoiles fixes, lorsque le soleil est en conjonction avec elles, augmentent considérablement la chaleur de cet astre, et c’est en effet ce qu’on observe lorsqu’il est dans le signe du Lion et durant les jours caniculaires.

2° (corresp. au 2e affirm.). Les rayons du soleil ne produisent aucune chaleur sensible dans ce qu’on appelle la moyenne région de l’air ; et ce froid qui y règne, on l’explique assez bien en disant que cette région n’est assez proche ni du corps même du soleil d’où émanent les rayons, ni de la terre qui les réfléchit ; et ce qui appuie cette explication, c’est ce qu’on observe au sommet des hautes montagnes, qui sont en tout temps couvertes de neige à moins qu’elles ne soient prodigieusement élevées ; je dis prodigieusement, parce qu’on ne trouve jamais de neige ni sur le sommet proprement dit du pic de Ténériffe, ni sur celui des Andes du Pérou, les neiges n’occupant que la partie moyenne de leur penchant et ne s’étendant que jusqu’à une certaine hauteur. De plus, on s’est assuré que, sur ces mêmes sommets, l’air n’est nullement froid ; mais il est si rare, si ténu, si âcre sur les Andes, qu’il pique les yeux et les blesse par cette excessive acrimonie. Il irrite aussi l’orifice de l’estomac, et excite le vomissement. De plus, les anciens ont observé qu’au sommet de l’Olympe l’extrême ténuité de l’air obligeait ceux qui y montaient de se munir d’éponges imbibées d’eau et de vinaigre qu’ils approchaient de temps en temps de leur bouche et de leurs narines, cet air si rare ne suffisant plus à la respiration. On rapporte aussi que, sur ce même sommet, où il n’y avait jamais ni pluie, ni neige, ni vent, il régnait un calme si parfait que certaines lettres que les sacrificateurs traçaient avec leur doigt dans la cendre des sacrifices, sur l’autel de Jupiter, subsistaient jusqu’à l’année suivante sans s’effacer et même sans qu’on y aperçût le moindre changement. Aujourd’hui encore les voyageurs qui montent jusqu’au sommet du pic de Ténériffe n’y vont que de nuit, jamais de jour ; et peu après le lever du soleil leurs guides les avertissent et les pressent même de descendre, de peur apparemment que cet air si ténu ne dissolve leurs esprits et ne les suffoque.

3° (corresp. au 2e affirm.). Il faut que, dans les régions situées près des cercles polaires, la chaleur résultante de la réflexion du soleil soit bien faible et ait bien peu d’action ; car des Flamands qui hivernaient dans la Nouvelle-Zemble et attendaient que leur navire fut débarrassé des glaces énormes qui le tenaient comme