Page:Œuvres de Barthélemy et Méry, tome 3, 1831.djvu/85

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Du fond de ses jardins, verdoyante prison,
Il contemplait le Nil fuyant à l’horizon,
Ou près d’une ottomane appelant ses captives,
Il enivrait ses yeux de leurs danses lascives.
Allah lui réservait un plus noble destin !
Les femmes du sérail ont pleuré ce matin :
Elles ont vu Sélim, sur son cheval de guerre,
Brandir, en souriant, un large cimeterre,
Et voler pour rejoindre, aux heures du péril,
Ses vingt frères campés sur les rives du Nil ;
Ses vingt frères… Hélas ! la voix de leur prophète
Les avait conviés à leur dernière fête !
En vain le peuple en deuil, à la chute du jour,
Sous les portes du Kaire attendra leur retour ;
Ils ont vécu ! Sélim compte, d’un œil farouche,
Leurs cadavres tombés sur la sanglante couche,
Et qui, la veille encor de ce jour éternel,
Déposaient sur son front un baiser fraternel.