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TRAITÉ DE LA PESANTEUR DE LA MASSE DE L’AIR

avons fait voir la raison de cet effet dans l’Equilibre des liqueurs.

6. Comme il arriveroit en un grand amas de laine, si on en avoit assemblé de la hauteur de vingt ou trente toises, que cette masse se comprimeroit elle mesme par son propre poids, et que celle qui seroit au fond seroit bien plus comprimée que celle qui seroit au milieu, ou prés du haut, parce qu’elle seroit pressée d’une plus grande quantité de laine[1], ainsi la masse de l’Air, qui est un corps compressible et pesant aussi bien que la laine, se comprime elle mesme par son propre poids ; et l’Air qui est au bas, c’est à dire dans les lieux profonds, est bien plus comprimé que celuy qui est plus haut, comme aux sommets des montagnes, parce qu’il est chargé d’une plus grande quantité d’Air.

7. Comme il arriveroit en cette masse de laine, que si on prenoit une poignée de celle qui est dans le fond, dans l’estat pressé où on la trouve, et qu’on la portât, en la tenant toujours pressée de la mesme sorte, au milieu de cette masse, elle s’élargiroit d’elle mesme, estant plus proche du haut, parce, qu’elle auroit une moindre quantité de laine à supporter en ce lieu là. Ainsi si l’on portoit de l’Air, tel qu’il est icy bas, et comprimé comme il y est, sur le sommet d’une montagne, par quelque artifice que ce soit, il devroit s’élargir luy mesme, et devenir au

  1. Nous avons retrouvé cette comparaison avec la laine à la fois dans la correspondance de Descartes, dès 1631 (vide supra, t. II, p. 46, n. 4), et dans celle de Torricelli, 1644 (vide supra, t. II, p. 157, n. 1).