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qu'il luyplaist. Je sçay qu'il a voulu qu'elles entrent du cœur dans l'esprit, et non pas de l'esprit dans le cœur, pour humilier cette superbe puissance du rai- sonnement, qui prétend devoir estre juge des choses que la volonté choisit, et pour guérir cette volonté infirme, qui s'est toute corrompue par ses sales atta- chemens\ Et de là vient qu'au liea qu'en parlant des choses humaines on dit qu'il les faut connoistre avant que de les aymer, ce qui a passé en proverbe ^ les saints au contraire disent en parlant des choses divines qu'il les faut aymer pour les connoistre, et qu'on n'entre dans la vérité que par la charité, dont ils ont fait une de leurs plus utiles sentences.
En quoy il paroist que Dieu a establi cet ordre sur- naturel, et tout contraire à l'ordre qui devoit estre naturel aux hommes dans les choses naturelles. Ils ont neantmoins corrompu cet ordre en faisant des choses profanes ce qu'ils dévoient faire des choses saintes, parce qu'en effet nous ne croyons presque que ce qui nous plaist. Et de là vient l'esloignement où nous sommes de consentir aux veritez de la reli- gion chrestienne, tout opposée à nos plaisirs. Dites
��I. Cf. Pensées, fr. 58i, T, III, p. 26 : « Dieu veut plus disposer la volonté que l'esprit... Abaisser la superbe. »
3. Allusion au mot d'Ovide : Ignoti milla cupido. Dans ce passage Pascal se souvient de VAugustimis, tome II, Liber Proœmialis, cap. vu : Duplex modus penelrandi mysleria Dei, hiimana ratione et charitate. Jan- sénius y cite entre autres ces textes de Saint Augustin : 1^ (Tract. 97 in Joan.): Non diligitiir qiiod penitas ignoratur; sed cum diligit qiiod ex qiiantulacamque parte cognoscitur, ipsa ejficitar dilectione, ut melius et plenius cognuscatur. — 2° (de Gralia contra Faustuni, cap. xvui) : Non intratar in veritatem, nisi per charitatem.
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